Master Qualité - Communication publique des résultats d'un stage de fin d'études
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Comment lier les réussites technique et humaine dans la digitalisation des process industriels ?
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Luxi PANG
Référence bibliographique à rappeler pour tout usage :
Comment lier les réussites technique et humaine dans la digitalisation des process industriels, PANG Luxi, Université de Technologie de Compiègne, Master Qualité et Performance dans les Organisations (QPO)
Mémoire d'Intelligence Méthodologique du stage professionnel de fin d'études, juin 2018, www.utc.fr/master-qualite, puis "Travaux", "Qualité-Management", réf n° 447
RESUME
Aujourd’hui, les industries sont face à la révolution « Industrie 4.0 » : des systèmes de production cyber-physiques. La digitalisation est donc en train de devenir un des principaux objectifs de toutes les entreprises industrielles. La digitalisation a non seulement des aspects technologiques, mais aussi des aspects socio-économiques. Ainsi donc pour un bon déploiement des nouveaux systèmes informatiques, l’accompagnement du changement autour des personnels est aussi indispensable que l’amélioration continue de l’outil.
Ce mémoire propose une approche pour réussir le déploiement des nouvelles solutions digitales dans les industries. Cette approche repose sur les principes fondamentaux de la qualité tels que l’amélioration continue PDCA et la conduite de changement. Ce mémoire met à disposition un projet de digitalisation des process industriels comme exemples d’application : le système de validation pour les changements de production.

Mots clés : digitalisation ; industrie ; accompagnement du changement ; amélioration continue

ABSTRACT

Today, industries are facing the "Industry 4.0" revolution: cyber-physical production systems. Digitization is therefore becoming one of the main objectives of all industrial enterprises. Digitization is not only about technological aspects, but also about socio-economic aspects. So, for a good deployment of the new computer systems, the support of the change around employees is as indispensable as the continuous improvement of the tool.
This thesis proposes an approach for successfully deploying new digital solutions in industries. This approach is based on the fundamental principles of quality such as PDCA continuous improvement and change management. This thesis provides a project for digitizing industrial processes as examples of application: the validation system for production changes.

Keywords: digitization; industries; change management; continuous improvement





Remerciements

        Je tiens tout d'abord à remercier mon tuteur du stage M. Florian MOULIN pour m’avoir permis d’effectuer ce stage et apporter toute son aide afin de réaliser les différents projets.
        Je remercie également l’équipe HS&E, l’équipe support et toutes les équipes d’opération de packing HDL pour leur coopération et leur soutien tout au long de mon stage.
        Enfin, je souhaiterais remercier tous les enseignants du Master Qualité et Performance dans les Organisations pour leur partage de savoir-faire de la qualité et du management.

Sommaire

Abréviations
PDCA : Plan – Do – Check – Act.
QQOQCP : Qui, Quoi, Où, Quand, Comment, Pourquoi.
SWOT : Strengths, Weaknesses, Opportunities, Threatens.

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Introduction
  

Après la mécanisation au 18ème siècle, la production de masse au 19ème siècle et l’automatisation de la production au 20ème siècle, aujourd’hui la 4ème révolution industrielle est une révolution numérique des processus de fabrication [1].

Dans ce contexte de transformation digitale, le rôle des opérateurs évolue d’un exécuteur de tâches simples à un superviseur qui assure la bonne communication des machines connectées. De même, comme une partie des opérations est traitée par les machines, les ingénieurs travaillent de plus en plus sur l’analyse des données afin de réaliser l’amélioration continue de la performance des lignes de production [2].

La plupart des entreprises ont déjà pris conscience de l’importance du digital [3]. Comme pour les précédentes révolutions, cette transition vers le numérique est une stratégie défensive et offensive qui permet aux industries d’améliorer leur compétitivité ainsi que leur rentabilité [4].

Pourtant, il n’est pas facile de réussir la transformation digitale car le vrai challenge de la digitalisation n’est pas la technologie, mais le changement transversal dans l’organisation [5]. Le changement est une action d’abandonner l’existant connu et d’adhérer à un futur promis. Il suscite la peur de la prise de risques face à un futur incertain [6]. Par conséquent, il est indispensable pour les entreprises de se préparer pour une conduite du changement.

Ce mémoire repose sur un projet de déploiement d’un nouveau système informatique de validation sur les lignes de production. Il s’appuie sur une approche prenant compte des facteurs technologiques et humains. Inspirée de la méthode fondamentale de l’amélioration continue PDCA (Plan-Do-Check-Act) et de la méthode de la conduite du changement (Diagnostic-Accompagnement-Pilotage) de D.Autissier [6], l’approche « DPAPC » est composée de 5 phases dans un cycle :

1.    Diagnostic ;
2.    Planification ;
3.    Accompagnement : la communication et la formation ;
4.    Pérennisation : la validation et le suivi ;
5.    Correction.

L’objectif de ce mémoire est de répondre aux attentes des dirigeants et des responsables de digitalisation en proposant une nouvelle approche qui permet de lier les réussites technique et humaine lors du déploiement des nouveaux outils digitalisés.


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Chapitre 1 : Contexte, enjeux et objectifs

1.1.    Révolution industrielle 4.0 : digitalisation

Dans l’histoire des industries, il y eut quatre révolutions importantes : la mécanisation, la production en masse, l’automatisation et les systèmes cyber-physiques. Les 3 premiers termes sont faciles à comprendre mais quelle est exactement cette révolution 4.0 ?

  fig01

Figure 1 Industrie 4.0 [Christoph Roser at AllAboutLean.com]

L’industrie 4.0, ou l’industrie du futur, correspond à l’intégration numérique dans les processus de fabrication. A travers l’internet des objets, les machines et les capteurs s’échangent automatiquement des informations entre eux. Cette communication continue et instantanée permet de réaliser des auto-évaluations et d’améliorer la flexibilité d’adaptation aux besoins du client [1].

L’usine ressemblera plus à une plate-forme du digital qu’un lieu de production [7]. Au milieu des machines interconnectées, le travail des opérateurs sera d’assurer le fonctionnement de la communication continue des objets. Puis les données collectées par les machines permettent aux ingénieurs de réaliser des analyses afin d’optimiser le système de production [2].

Depuis la conception jusqu’à l’analyse du retour client, la digitalisation est appliquée dans tout le suivi du produit. Grâce à ce flux d’informations, la logistique peut échanger rapidement les idées avec les clients et ajuster les productions en fonction des demandes spécifiques. L’agilité et la personnalisation constituent de nouvelles opportunités [4].

Dans les industries, la digitalisation permet d’interconnecter les objets, les données pour améliorer les moyens de production mais aussi la sécurité des employées, à travers des analyses des risques liées à l’environnement et aux comportements [7].

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1.2.    Digitalisation : opportunités et obstacles

Comme tous les changements, la transformation numérique offre de nouvelles perspectives aux entreprises, mais aussi de nouveaux défis.

La digitalisation permet d’améliorer la compétitivité de l’entreprise en optimisant :

•    La flexibilité de la production pour s’adapter au besoin du client ;
•    La productivité ;
•    La qualité des produits et la traçabilité ;
•    La maintenance des machines ;
•    La sécurité des personnels de production ;
•    L’efficacité énergétique de l’usine ;
•    Le coût de transport et de logistique [8].

Mais face à ces nombreuses opportunités, différents obstacles ralentissent la digitalisation dans l’usine :
•    Le manque de culture et de formation à l’environnement digital ;
•    Le développement retardé des infrastructures technologiques ;
•    Le manque de volonté et d’engagement du top management [8] ;
•    La peur de ne pas maîtriser les nouvelles technologies ;
•    Le choc des nouveaux modes de collaboration et de management [3].
Dès lors, la réussir de la transformation digitale devient incertaine. La digitalisation est une application des technologies mais surtout une évolution des comportements. Elle exige beaucoup de coopération, un management moins vertical, l’orientation vers les clients… Dans une enquête réalisée par D. Auttisier, la plupart des industries pensent que les anciennes méthodes de conduite du changement ne sont plus suffisantes [3].

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1.3.    Le vrai challenge de la digitalisation n’est pas la technologie

Le point clé pour réussir la transformation digitale est le facteur « humain ». Malgré l’automatisation et la numérisation, l’humain reste toujours au centre de la production. Il est facile de gérer les machines par des moyens technologiques mais aucune technologie pourrait manipuler les sentiments humains. Par rapport aux défauts techniques, la résistance des hommes lors du changement digital se trouve souvent être le frein majeur de l’avancement des projets.

Le changement lié à la digitalisation est transversal dans l’organisation. Changer fait peur aux opérateurs car cela les oblige à changer leurs habitudes de travail. Les dirigeants doivent également changer leur rôle d’un management hiérarchique à un management participatif [9].

De ce fait, il faut diffuser une culture digitale du haut en bas dans l’entreprise. Les dirigeants prennent le leadership pour montrer la volonté d’engagement de la démarche de digitalisation. Ces actions favorisent donc l’attitude sérieuse aux autres collaborateurs lors de la mise en œuvre du changement [5]. De plus, les formations et les ateliers permettent aux collaborateurs de participer à l’amélioration du produit final de la digitalisation [9].

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1.4.    Présentation du projet de digitalisation

Afin de mieux comprendre comment réussir la digitalisation dans les industries, ce mémoire repose sur un projet réalisé dans le département de conditionnement d’une usine de production de lessive.

La lessive fait partie des produits de grande consommation et une des principales caractéristiques de sa production est l’agilité. La variabilité des marques, des formats, des formules permet à l’entreprise de répondre rapidement aux besoins des clients (ex : la grande distribution) et de réduire sa quantité de stockage sur le site. Cette variabilité des produits génère des petites productions ainsi que de nombreux changements de production (marque, format, flacon…etc.)

Certes, pour assurer la qualité du produit, le processus de validation est obligatoire à chaque changement de production. La validation est composée de :
-    Contrôle par rapport au standard de production ;
-    Contrôle physique des matériels sur la ligne ;
-    Contrôles unitaires (codage, poids, palettisation…) ;
-    Etiquettes de 1ère et dernière palette.
Le problème du processus actuel de validation est l’écriture sur la checklist en papier. Pour chaque changement, l’opérateur a environ 50 cases à remplir à la main. Sur une ligne de conditionnement, le nombre de changements peut atteindre quasiment 200 par mois. Un projet de digitalisation du processus de validation est donc lancé pour résoudre ce problème de perte du temps et l’ennuie lié aux tâches répétitives.

Après la réalisation par un fournisseur extérieur, l’outil digitalisé a été déployé sur une première ligne en novembre 2017. Les résultats n’étaient pas totalement satisfaisants. Il y avait occasionnellement un écart de qualité d’utilisation de l’outil. Certains opérateurs ne validant pas tous les contrôles avant de clôturer le dossier de production, d’autres traînant les dossiers sans clôture. Avec les dysfonctionnements apparus, les opérateurs perdent de plus en plus confiance en ce nouvel outil digital et le traite de moins en moins sérieusement. Parfois, ils montrent même leur envie de revenir en arrière pour reprendre la checklist papier.

Ce premier déploiement a été réalisé par un autre responsable du département de conditionnement. Avec la transition du projet, la mission à réaliser par l’auteur est le déploiement de l’outil sur les autres lignes de production.

Suite à ce retour d’expérience, la problématique émerge : il est difficile de mettre en place un nouvel outil digitalisé sur la ligne. Pour cela, la raison n’est pas la technologie, mais l’humain. Afin d’aboutir à la problématique, un outil d’analysé QQOQCP a été appliqué :   

fig02

Figure 2 QQOQCP du projet de digitalisation [source auteure]

Dans le but d’obtenir cette double réussite, la planification dynamique stratégique est utilisée pour insérer ce projet dans une logique d’amélioration continue.

fig03

Figure 3 Planification dynamique stratégique du projet [source auteure]


Ce projet de digitalisation concerne deux types d’enjeux :
1.    Techniques :
2.    Humains
La méthode d’analyse SWOT est ensuite appliquée pour étudier l’environnement du projet. Les forces, les faiblesses, les opportunités et les menaces sont analysées afin de bien comprendre la situation et d’établir les objectifs.

fig04

Figure 4 Analyse SWOT du projet [source auteure]

Dans cette analyse, l’avantage identifié est le retour d’expérience du premier déploiement en 2017 et la volonté d’engagement des dirigeants. Les menaces pour ce projet sont également claires : les risques liés à la résistance des opérateurs. Afin de gérer cette résistance, il faut donc une méthode structurée pour accompagner les opérateurs au changement lors de la transformation de digitalisation.

 

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Chapitre 2 : Méthodologie pour la mise en place d’un outil digitalisé

2.1.    Modèle de la conduite du changement « les cycles du changement »

Dans l’analyse SWOT, les menaces de ce projet de digitalisation concernent les aspects humains. Il faut donc choisir un modèle de conduite du changement pour faire adhérer les différents acteurs du projet dans un environnement de co-construction.


fig05 

Figure 5 Un modèle de conduite du changement [6]

    
Autissier et Moutot ont fait une synthèse méthodologique de la conduite du changement selon la figure 5 avec un noyau central de diagnostic et un cycle d’actions d’accompagnement et un cycle de pilotage dans une logique continue « Objectif – Réalisation – Ecarts » [6].
    

Le cycle des changements est constitué de trois étapes :
1. Diagnostic

Le diagnostic est considéré comme le premier pas vers la réalisation de la conduite du changement. A travers ce diagnostic indispensable, les acteurs concernées et les besoins de la conduite du changement sont identifiés. Cela permettra d’éviter la perte de temps dans la détermination des actions pertinentes pour la conduite.


2. Accompagnement

L’étude d’impact représente une liste d’impacts liés au projet en précisant leurs différentes natures (opérationnel, organisationnel…etc.) et les populations concernées. Cette étude est importante dans l’accompagnement du changement car le dossier de communication et le dossier de formation sont établis en fonction du nombre et de la nature des impacts relevés.

La partie communication consiste à faire adhérer les personnes à une transition entre la réalité et le futur. Les actions et les choix de l’outil sont décrits dans un plan de communication.

Dans les projets, notamment ceux des outils informatiques, la formation est nécessaire pour donner des nouvelles compétences aux acteurs concernés. Les besoins, le contenu, les bénéficiaires et les échéances sont ainsi définis dans un plan de formation. Ce plan est ensuite utilisé pour la création du support, la réalisation de formation et l’évaluation.

3. Pilotage

La gestion des résistances se matérialise par une analyse socio-organisationnelle. Elle consiste à définir la culture et les valeurs de l’entreprise, les habitudes et le niveau de résistance des différents acteurs dans un projet.

Pour le pilotage du changement, trois outils sont proposés pour mesurer l’écart de la réalisation de la conduite du changement et l’objectif initial : le suivi des actions, la gestion des risques et le contrôle des transformations. Le suivi des actions de la conduite du changement est composé des indicateurs en termes de coût et de planning. Le dossier de la gestion des risques est constitué des indicateurs pour évaluer le niveau de résistance et de participation. Le dossier des transformations a pour but de vérifier si le changement accompagné aide à améliorer la performation de l’entreprise et les processus concernés.

« Les cycles du changement » est l’une des méthodes la plus appropriées pour accompagner le changement lors de la digitalisation. Mais la logique du cycle s’arrêtant à « Ecarts » manque une dernière action de « Correction » afin de faire vivre l’outil dans un environnement en continue.

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2.2.    Méthode de l’amélioration continue « PDCA »

Lorsque l’objectif et la cible sont bien connus dans ce projet de digitalisation, la méthode d’amélioration continue PDCA pourrait s’appliquer comme une stratégie de changement planifié [10].


fig06 

Figure 6 La méthode PDCA [source auteure]

La méthode « PDCA » ou la roue de Deming est une méthode fondamentale pour la gestion de la qualité. Dans cette méthode, les actions sont planifiées en amont afin d’obtenir les résultats attendus. La méthode est composée de 4 étapes :

•    Planifier (Plan) : définir les besoins, les objectifs et les moyens pour atteindre résultats ;
•    Développer (Do) : mettre en œuvre le plan d’actions pour réaliser les objectifs ;
•    Contrôler (Check) : mesurer l’écart entre les objectifs et les résultats ;
•    Ajuster (Act) : mise en place d’actions correctives pour réduire les écarts avec l’objectif.

La méthode « PDCA » sert de base à l’amélioration continue dans la gestion de la qualité. Ainsi elle peut être utilisée pour compléter le modèle précédent « les cycles du changement ».

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2.3.    La nouvelle méthode « DPAPC »

Inspirée des deux méthodes précédentes, la nouvelle méthode « DPAPC » représente une boucle dans une logique de « Plan-Do-Check-Act » mais les étapes sont plus adaptées pour la conduite du changement.


fig07 

Figure 7 La méthode DPAPC |source auteure]

La méthode « DPAPC » dispose de 5 étapes :
1. Diagnostic

Comme dans le modèle d’Autissier, la première et la plus importante étape est de réaliser un diagnostic afin de construire un plan d’actions par la suite. Ce diagnostic doit comprendre les éléments suivants : les besoins, les objectifs (le constat, les résultats attendus et les gains attendus), les risques, les populations concernées et l’impact associé. Si un projet a déjà commencé, un retour d’expérience permet aussi de replacer le positionnement du projet.     


2. Planification

Le planning du changement de digitalisation se fait en fonction des acteurs et des risques relevés dans le diagnostic. Le niveau d’impact détermine également la priorité dans l’accompagnement. Dans ce planning, il faut prendre en compte le personnel et le matériel pour réaliser par la suite l’accompagnement du changement.  


3. Accompagnement

L’accompagnement comprend la communication et la formation. La communication avec les différents acteurs prépare en amont le terrain pour le changement. La formation donne ensuite des nouvelles compétences informatiques (projet de digitalisation). La réussite de la formation dépend d’une bonne communication. Il est plus simple de faire les gens apprendre des nouvelles habitudes s’ils connaissent leurs valeurs ajoutées dans le projet.


4. Pérennisation

Après la formation, le niveau et la qualité de l’utilisation de l’outil digitalisé sont suivis à distance. Par les différents moyens de communication (mail, affiche, meeting…), les porteurs du projet donnent rapidement leur retour aux utilisateurs. En suivant le protocole de validation, les utilisateurs doivent prendre petit à petit l’habitude de manipuler le nouveau système digitalisé.      


5. Correction
En long terme, la dernière étape est de contrôler l’état de d’avancement du projet et de corriger les écarts identifiés. Les écarts humains pourraient être l’insatisfaction des acteurs bénéficiaires. L’analyse de l’insatisfaction est indispensable car sans la force imposé, l’acceptance réelle des acteurs déterminera la durée de vie de l’outil déployé. En terme technique, la résolution des problèmes apparus encourage la participation des acteurs afin d’amener une démarche d’amélioration continue sur le projet.

 

 

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Chapitre 3 :Mise en œuvre de la méthode « DPAPC » dans le projet de digitalisation

3.1.    Etape 1 : Diagnostic

Malgré des analyses dans la présentation du projet dans le chapitre 1.1, la réalisation de la note de cadrage est nécessaire pour assembler les principaux éléments et faciliter l’établissement du plan d’actions par la suite. La note de cadrage du projet de changement contient six parties [6]:

1. Origne du besoin : L’évolution de l’utilisation des objets digitaux.

2. Constats : Le processus de validation des changements de production se fait toujours en papier, ce qui augmente la fatigue des opérateurs en ligne et la difficulté d’archivage des dossiers.

3. Résultats attendus :
•    Le déploiement de l’outil digitalisé ;
•    La rédaction des procédures opérationnelles.
4. Gains attendus :
•    Faciliter le processus de travail des opérateurs ;
•    Améliorer la productivité en réduisant la perte du temps.
5. Risques perçus :


fig08 

Figure 8 Risques du déploiement de l'outil digitalisé [source auteure]

6. Acteurs concernés :

fig09

Figure 9 Cartographie des acteurs du projet de digitalisation [source auteure]

En plus de la note de cadrage, l’étude d’impact associé au projet aide à comprendre la complexité du projet de changement. Dans la méthode de la conduite du changement d’Autissier, il divise un changement en dix types différents [6]:
•    Compétences
•    Procédures
•    Postes et emplois
•    Structure
•    Mode de management
•    Indicateurs de performance
•    Outils et systèmes
•    Culture
•    Comportement
•    Pouvoir
 Pour chaque type de changement, cinq questions sont disponibles pour quantifier le niveau d’impact. Par exemple, pour détecter les changements du type compétence, il y a les questions suivantes [6]:
•    La complexité des tâches actuelles va-t-elle augmenter ?
•    Y a-t-il de nouvelles connaissances à avoir pour exercer la fonction ?
•    Y a-t-il de nouveaux modes opératoires à maîtriser ?
•    Y a-t-il de nouvelles méthodes à maîtriser ?
•    L’autonomie des personnes va-t-elle augmenter ?
Pour le cas de ce projet de digitalisation, le nombre de réponses positives est de quatre. Le niveau d’impact sur les compétences est donc de 4.
 

fig10 

Figure 10 Etude de l'impact du projet de digitalisation |source auteure]

Suite à la figure 10, les changements de compétences et des outils sont les plus impactés. Ces deux types de changements nécessitent des supports et des séances de formation pour la théorie et la pratique. La communication est donc secondaire quant à l’apprentissage des nouvelles compétences et des nouveaux outils. Au contraire, pour les changements de type comportement, la communication doit être priorisée afin de minimiser la résistance du personnel. Une matrice mettant l’ordre d’action pour chaque type de changement permettra de mieux choisir les priorités dans le plan d’actions. P signifie prioritaire et S secondaire.


fig11 

Figure 11 Matrice de l'impact et les leviers de l'accompagnement du changement [source auteure]


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3.2.    Etape 2 : Planification


fig12 

Figure 12 Planning du projet de digitalisation [source auteure]


Le planning est constitué de cinq étapes suite à la méthode « DPAPC ».

En prenant compte de la durée totale du projet, les actions pertinentes sont réparties en fonction du numéro de la semaine. Ce planning doit être revu chaque semaine afin de vérifier l’état d’avancement afin d’ajuster les actions suivantes.

Au début du lancement du projet, la préparation pour l’accompagnement est indispensable. Dans l’analyse des risques de « Diagnostic », les risques informatiques identifiés sont fortement liés à la connaissance et l’outil.

Tout abord, il est nécessaire de relever une liste des utilisateurs potentiels pour l’outil digital qui sera mis en place. Les porteurs du projet ont l’obligation de créer et de vérifier l’accès de tous les utilisateurs. L’échec de connexion provoque non seulement une validation retardée du déploiement mais aussi un sentiment de frustration et de méfiance des utilisateurs.

En termes de formation, le support décidera la qualité d’apprentissage. Dans ce projet, un retour d’expérience a été réalisé afin de connaître l’état du premier déploiement sur la ligne de conditionnement C4 en 2017. En effet, les opérateurs n’utilisent pas l’outil dans une manière appropriée :
•    L’ancienne checklist papier est toujours utilisée pour faire le contrôle physique des matériels sur la ligne car les opérateurs ne connaissent pas du tout le moyen de lecture de la liste digitalisé sur les tablettes
•    Les dossiers sont clôturés sans avoir validé tous les contrôles essentiels
•    Les dossiers sont achevés (sans clôture)
Dans le but d’éviter ces mauvaises habitudes dès le début de formation, il faut créer un support détaillé et interactif qui permet de capter l’attention des futurs utilisateurs.

fig13 

Figure 13 Exemple du support [source auteure]

La formation est ensuite complétée par la qualification. La fiche de qualification est une liste de connaissances qui doit couvrir toutes les étapes d’utilisation. Cette fiche pourrait aussi être utilisée pour déterminer la responsabilité de chaque partie en cas de blocage de production causés par de mauvaises manipulations.

fig14 

Figure 14 Fiche de la qualification pratique [source auteure]

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3.3.    Etape 3 : Accompagnement

L’accompagnement correspond à la communication et à la formation.

La communication est une action en parallèle des autres actions telles que la formation, le suivi et la validation. Dans ce projet de digitalisation, 5 outils de communication ont été utilisés pour échanger les informations avec des différents acteurs :

fig15 

Figure 15 Choix des outils de communication [source auteure]

Les réunions sont organisées au démarrage du déploiement du projet. Les responsables du projet font intervenir les opérateurs et les managers pour leur transmettre le contexte, les objectifs et les résultats attendus du projet.

Les affiches et les emails de diffusion sont utilisés pour annoncer les informations importantes concernant tout le groupe des acteurs. Par exemple, avant de commencer le processus de validation, il faut préparer la communication avec les opérateurs et le manager de la ligne. Les emails de diffusion sont plus formels dans la communication de l’entreprise. Pourtant, les affiches sont parfois plus adaptées car les opérateurs ont souvent peu l’habitude de lire les messages sur les ordinateurs. En ajoutant l’image et le slogan, les affiches jouent un rôle de sensibilisation en attirant l’attention de manière discrète.

Les mails individuels et les entretiens sont faits pour informer et orienter les utilisateurs après le suivi et le contrôle de l’utilisation.

fig16 

Figure 16 Schéma de processus de la communication [source auteure]

Dans le projet de digitalisation, la communication a un rôle central et structurant car elle favorisera une bonne compréhension et une parfaite adhésion des acteurs impactés par le changement.        

La formation est un levier important dans le projet de digitalisation. En effet, il est nécessaire de donner de nouvelles compétences sur les fonctionnalités de l’outil digitalisé aux acteurs concernés. La maîtrise de ces enseignements permettra stabiliser la mise en œuvre de l’outil digitalisé.

fig17 

Figure 17 Schéma des processus de formation [source auteure]

La première étape est d’identifier les besoins de la formation :
•    Populations : les opérateurs sur les lignes de conditionnement B3 et C6 ;
•    Compétence : les méthodes et les simulations pour réaliser la validation des informations (matériels, codages…etc.) avec l’outil digitalisé ;
•    Temps souhaités : Formation théorique en équipe (30 min/quart) ; coaching individuel pour la pratique (20min/personne).
Après l’identification, un plan de formation détaillé doit être mise en place. Il est aussi rajouté dans le planning du projet de l’étape « Planification » pour maintenir la pertinence entre le levier formation et la globalité du projet.

Les supports de formation et la fiche de qualification ont été réalisés à l’étape de « Planification ». Grâce au retour d’expérience du premier déploiement en 2017, les problèmes d’utilisation remontés sont devenus les points de formation à renforcer. Cela contribue à l’amélioration des supports afin qu’ils soient plus appropriés à la vraie pratique quotidienne.

A la fin, pour évaluer la formation, la simulation de changement de production est effectuée pour chaque opérateur. Il est uniquement qualifié si toutes les connaissances sur l’utilisation de l’outil ont été acquises.

fig18 

Figure 18 Planning d'avancement des formations théorique et pratique sur Line B3 [source auteure]


fig19 

Figure 19 Planning d'avancement des formations théorique et pratique sur Line C6 [source auteure]

En outre, la comparaison des dates de formation planifiée et celles de formation réalisée permet de surveiller le taux d’avancement et d’optimiser l’organisation. Par exemple, la formation théorique était en retard sur la ligne B3 durant la semaine 21 et 22 en raison des congés imposés par les opérateurs. L’absence des personnels est donc un facteur essentiel qui devrait être pris en compte dans l’élaboration du plan de formation. Ce retard du projet sera ensuite communiqué avec les managers et les dirigeants.


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3.4.    Etape 4 : Pérennisation

La pérennisation est une étape où les utilisateurs s’habituent progressivement à l’outil. Le suivi et le contrôle sont importants de façon à orienter et guider en cas d’écart d’utilisation avant la validation finale du déploiement de l’outil sur la ligne.

fig20 

Figure 20 Schéma des processus de pérennisation [source auteure]

La qualification est individuelle mais la validation est collective. Avant de lancer le processus de validation, il faut tout abord élaborer le protocole de validation avec les différents acteurs du projet. L’équipe de digitalisation assiste en donnant les éléments techniques liés à l’outil. Le service qualité et les managers complètent le protocole avec les critères de succès et les autres exigences opérationnelles.

Durant le processus de validation, l’utilisation de l’outil digitalisé est suivie à distance. L’objectif de la digitalisation est de remplacer le processus de validation des changements de production par un système digital. La checklist papier est donc utilisée en même temps que l’outil digital afin de vérifier si toutes les informations présentes dans les deux médias sont identiques. Chaque dossier numérique enregistré est comparé avec la checklist papier par le responsable de projet. Si un problème lié à l’utilisation est retrouvé, comme des contrôles non validés, le responsable donne un retour immédiat à l’opérateur correspondant pour corriger sa mauvaise utilisation de l’outil.

Après la période de processus de validation, le rapport doit être rédigé le plus rapidement possible car l’utilisation des deux systèmes crée une surcharge de travail pour les opérateurs. Trop d’attente leur donnerait également un effet négatif sur leur motivation et leur participation au changement.   

Comme dans la figure 16, après la validation, la bonne réaction est de communiquer les résultats rapides pour féliciter les efforts de tous les opérateurs. En plus, le responsable du projet de digitalisation signale le gain de productivité aux responsables de production. Cela permet de minimiser le découragement des opérateurs et la méfiance des dirigeants.


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3.5.    Etape 5 : Correction

La dernière étape a pour but d’observer les écarts des résultats afin d’amener des actions d’amélioration.

Les résultats escomptés dans le chapitre 1 contiennent trois parties :
1. Remplacement du papier par l’outil digital ;
2. Acceptation du changement de digitalisation ;
3. Outil plus adapté.
Pour le premier résultat escompté, en mettant en place la méthode « DPAPC », l’outil digitalisé a été déployé sur les lignes de production après la validation de la hiérarchie.

L’acceptation du changement peut être quantifié et qualifié par plusieurs indicateurs. Le taux d’utilisation de l’outil est de 100% dans la production quotidienne. Le taux des dossiers sans défauts atteint 95%. Des questionnaires de satisfaction concernant le changement pourraient aussi aider à évaluer le taux d’acceptation du changement. Ce projet n’a pas utilisé les questionnaires par manque de temps alloué au projet.

En vue d’adapter l’outil digitalisé, il faut résoudre les problèmes techniques rencontrés et identifier les possibilités d’amélioration. Si un opérateur fait un feedback sur le disfonctionnement d’un élément (caméra connectée, machine de pesée…etc.), le responsable du projet doit chercher les causes et répondre à son besoin dans un court délais. Sinon les opérateurs ont la tendance de retourner à leurs anciennes méthodes de travail par peur et par méfiance par rapport à l’outil. Concernant l’amélioration, le responsable peut vérifier toutes les différences entre le processus actuel en papier et le processus digitalisé par le fournisseur extérieur. Par exemple, il manque plusieurs informations dans le nouveau système digital concernant la checklist papier et le contrôle sur le nouvel outil est donc incomplet d’après le service qualité. Après des réunions avec les différents acteurs, un cahier des charges de modifications est réalisé afin de rendre l’outil digital plus conforme au processus actuel.


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Conclusions

La transformation digitale est une stratégie défensive mais aussi offensive des industries. Ne pas digitaliser ses processus de production risque d’être dangereux pour le développement à long terme. De plus, la digitalisation apporte potentiellement des avantages concurrentiels sur la productivité, la flexibilité de la production et la qualité.  

Le déploiement d’un outil digitalisé peut provoquer un impact transversal sur les différentes populations présentes dans l’entreprise. Dès lors, la technique n’est plus le seul facteur pour réussir la transformation digitale, l’accompagnement du changement aide également à faire adhérer les acteurs aux nouveaux outils ainsi qu’aux nouvelles habitudes.

La méthode « DPAPC » mise en place est inspirée du modèle de la conduite du changement « les cycles du changement » d’Autissier et la méthode d’amélioration continue « PDCA », et permet d’accompagner les acteurs impactés par le changement lors de la digitalisation en faisant également une amélioration de l’outil. La raison de la création de la méthode « DPAPC » est le fait que l’outil a été déjà réalisé par un fournisseur extérieur, le but final de ce projet de digitalisation est donc de le déployer sur des lignes de production et d’optimiser les fonctionnalités de l’outil.

Malgré sa première application, cette nouvelle méthode a finalement obtenu une réussite humaine et technique : les opérateurs prennent les nouvelles habitudes d’utiliser l’outil digitalisé dans la production quotidienne, l’outil a été optimisé pour être plus conforme au processus actuel. D’après les retours, les opérateurs sont majoritairement satisfaits de ce projet étant donnée le gain du temps et de productivité.

En raison du manque de temps accordé au projet, certaines mesures comme le taux d’adhésion au changement n’ont pas été réalisées. Il est tout de même préconisé de faire plus d’analyses durant la phase finale du projet afin d’apporter plus d’actions correctives dans cette boucle continue.


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Références bibliographiques
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